Thursday, July 1, 2010

La fin d'un bien long voyage

Voilà nous sommes partit pour Sajama. Notre minibus est venu nous chercher vers 8h30 et sept heures de routes plus tard nous arrivons au village de Sajama. La montagne qui porte le même nom est devant nous. Elle est imposante, presque intouchable. On se demande où la voie normale mène. Après avoir fait connaissance avec notre guide et nos mules nous partons pour trois heures de marches boliviennes (en fait cela nous en a pris une et demi) vers notre camp de base à 4800m. C’est désertique. Nous sommes au pied du Sajama, majestueux du haut de ses 6542m. À cause de bourrasques de poussière, nous montons nos tentes péniblement. La fin de journée approche et demain c’est le départ pour le camp avancé à 5690m.

Mathieu et Samer nous annoncent qu’ils ne se joindront pas à nous. La fatigue accumulée, l’acclimatation incomplète, nous avions déjà le pressentiment de cet abandon et voilà qu’il nous est confirmé. Nous serons donc quatre à tenter le sommet. La nuit est passable, mais le matin frisquet. On attend le soleil avant de sortir de la tente. Nos porteurs arrivent pendant notre déjeuner. Nous en aurons trois pour porter nos affaires personnels et matériels techniques. L’ascension jusqu’au camp avancé (campo alto) est longue et pénible. Décidément rien ne sera facile dans ce voyage. La terre glisse sous nos pas. La moraine ralentit notre progression. On nous avait promit six heures de marche, nous le faisons quand même en trois heures. On nous sous estime ou alors les estimés boliviens sont vraiment trop conservateurs.

Nous passons le reste de la journée à nous reposer sous la tente, et quand il y fait trop chaud on sort prendre des photos ou étudier le chemin qui sera le notre la nuit prochaine. Les topos parlaient d’une section technique et difficile. On la voit devant nous. On pourrait presque la toucher, mais elle est quand même à une heure et demie de marche. La montagne est couverte, mauvais signe. Les nuages sont présents depuis un moment, mais nous avons toujours espoir qu’ils disparaissent.

La nuit est très venteuse, le vent souffle continuellement. J’ai pu mettre mes bouchons et dormir un peu, mais ce n’est pas le cas de mon compagnon Léo. Il a très mal dormit. Notre guide passe me voir vers 2h30 pour me dire qu’il y a trop de nuage et de vent, nous devons repousser notre départ à 4h. Tout le monde n’a pas l’air de s’en plaindre. Une heure plus tard, même conclusion, le temps n’a pas changé : départ repoussé à 5h. La nuit semble interminable. Les nuages se tassent enfin mais nous avons bien du mal à nous réveiller. Les préparatifs sont lents et c’est vers 6h30 (tardivement) que nous quittons notre camp.

À peine 15mn de marche et Léo nous annonce son abandon. Il ne veut pas prendre de risque et ne se sent pas du tout en forme. 30mn plus tard c’est Elsie qui tourne les talons. Elle, qu’on pensait invincible avec son 8000m dans le sang, la fatigue aura eu raison de sa volonté. Je me demande si je fais bien de poursuivre. Comme à chaque ascension pénible que j’ai faite, je me pose les mêmes questions. Pourquoi est-ce que je fais ca ? Qu’est ce qui me pousse à m’éloigner des gens que j’aime pour tant souffrir. Après une heure et demi et marche nous arrivons aux pieds des difficultés. Nous devons nous équiper : crampons et encordement. Le vent est extrêmement fort, il fait très froid. Je regarde ma montre accrochée à mon sac à dos pour plus de facilité et elle semble perdre le nord. Il est 18h. L’affichage se trouble. La pile ne supporte pas la température glaciale. Je regarde Pierre et le guide se préparer. Je me demande ce que je fais. Je lève la tête et analyse la pente de neige qui se dresse devant nous. Les topos nous disaient 30mn de difficultés et ensuite cinq heures de marche sur le glacier pour rejoindre le sommet.

Purée cinq heures !!! C’est long. Je regarde Pierre de nouveau. Il a été malade comme un chien il y a une semaine, il a du faire une croix sur Condoriri, Elsie et moi l’avons trainé jusqu’au sommet du Huayna Potosi et maintenant c’est lui qui nous donne une leçon de courage. Parait-il que quelque heures auparavant, encore sous sa tente, il aurait faillit dire non. Mais il est la et se dit lui aussi que tout cela n’a pas de sens. Si Léo et Elsie abandonnent, sommes nous en bonne position pour continuer ? La réponse sonne dans ma tête mais je me refuse à l’accepter.

Je finis cependant par avouer à Pierre que je n’irai pas plus loin. Il me regarde et n’y crois pas. Le guide nous confirme qu’après le passage technique il resterait quatre heures pour rejoindre le sommet. Le regard de Pierre me supplie mais je ne craque pas. Il se résigne. Il continuera seul avec le guide. On se demande s’il s’agit de courage ou d’inconscience, c’est peut-être un peu des deux. Je reste à l’abri du vent et je les regarde progresser. Le soleil se lève et enflamme l’horizon, les couleurs sont terribles. Je photographie, je filme, finalement je reste bien une vingtaine de minute à admirer le paysage qui s’offre à moi. J’en profite pour immortaliser l’ascension de Pierre sur les difficultés.

Le retour vers le camp est plus rapide. En m’approchant je m’aperçois que tout n’est pas terminé. Le vent est de plus en plus fort. Les rafales sont impressionnantes, notre tente et celle de Francisco notre cuisinier manquent de prendre le bord. Nous sommes quand même installés à flanc de montagne. Je n’y crois pas, notre tente est à moitié penchée, elle risque de se déchirer à tout moment. Nous nous dépêchons de la vider, de remplir nos sacs de transport, pour la démonter. C’est épuisant de se battre contre les éléments. Léo et moi finissons par nous rendre au camp de base, suivit de peu par Elsie qui dormait dans sa tente sans se soucier de se qui se passait à l’extérieur. De son côté Pierre abandonne le sommet à quelques centaines de mètres, épuisé lui aussi. Nous laissons le camp de base, tous, pour nous rendre au plus vite au site des bains thermaux qui doivent clôturer notre programme. Nous y passons la journée suivante à relaxer, à boire de bonnes bières bien méritées.
Aujourd’hui jeudi le premier juillet, nous sommes à 48 heures de notre retour sur Montréal. Seul Pierre restera car il a une semaine supplémentaire ici. Il tentera l’Illimani, un autre 6000m. Nous lui souhaiterons bien du courage. Elsie, poursuit son parcourt au Pérou, elle ira rejoindre un couple d’ami, et faire de la montagne qui sait ?
Moi, j’ai hâte de rejoindre ma femme et mon fils qui fêtera ses un an le 14 juillet !


Les photos ont été ajoutées au site Picasa

FIN!